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24 septembre 2016 6 24 /09 /septembre /2016 13:56

Ceci est un livre coup de poing. L’auteur nous saisit par la peau du cou et ne nous lâche plus, déconcertés, angoissés, ravis malgré la noirceur des situations.

Noirceur des hommes violents, des ciels d’orages, des blocages affectifs indépassables, de la proximité de la mort. D’un attentat qu’on a presque oublié et qui a détruit, d’un souffle, tous les espoirs de l’héroïne.

Mais subsiste comme une irrigation souterraine venue de loin, sa volonté têtue de survivre en sauvant son enfant : il est tout entier dans la haine de lui-même et des autres.

Laurent Mauvignier nous emmène avec ses héros au bout du monde, là où on peut chevaucher à l’infini, s’arrêter près des ruisseaux, ou des yourtes des nomades kirghizes, partager les boulettes de viandes et le koumis.

Mais affronter les bandits, voleurs de chevaux, la tempête meurtrière, et ce garçon désemparé.

Le récit est comme une anamnèse en constante évolution, avec des plongées et des retours, apparemment inopinés, en fait savamment ménagés. Le lecteur y est interpelé autant que l’héroïne par l’urgence d’un dévoilement. On retraverse le Styx ensemble.

C’est un voyage, un morceau de vie aussi dans la beauté des lieux, des choses et du langage, et l’amour des êtres, si complexes soient-ils. Fraternels, ou dangereux.
Tout s’ordonne dans ce texte autour d’une colonne vertébrale, qui apparaît ailleurs dans l’œuvre de Mauvignier : les catastrophes publiques ont des répliques, en cascade, sur les destins privés. Visages de la fatalité ? Une œuvre d’art comme rempart
?

Un roman où le passé, l’imaginaire, les rêves, des états indistincts proches d’hallucinations, tiennent tant de place, où l’auteur décrit avec une extrême finesse des rencontres, une prairie, des reflets sur un glacier, une joute acrobatique entre cavaliers, tout un monde reconstruit. La beauté du monde.

Un style qui évoquerait peut-être à la fois Thomas Bernhardt (un des auteurs favoris de Mauvignier) et Mathias Enard, par la densité de son écriture, mêlée de baroque.

Coup de cœur, comme disent les libraires.

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